Counterinsurgency warfare | David Galula

Counterinsurgency warfare | David Galula

David Galula

1. L’AUTEUR :

Né à Sfax (Tunisie) en 1919, David Galula entre à Saint-Cyr en 1939. Sa promotion, « De l’amitié franco-britannique », reçoit ses galons de lieutenant dès le mois de mars 1940 afin de participer aux combats. Affecté au 1er régiment de Zouaves (Settat au Maroc), Galula assiste à la défaite. Rapatrié à Aix-en-Provence pour terminer sa formation, il rejoint l’Afrique du Nord et est réintégré avec le grade de lieutenant dans l’armée du général Giraud. Blessé, il est cité à l’ordre de l’armée à l’île d’Elbe. Il sert ensuite à l’ambassade de France à Pékin de 1945 à 1948 au moment où la Chine tombe dans les mains des troupes maoïstes. Lors de son séjour chinois, il est prisonnier des communistes. À partir de 1949, il est désigné comme observateur des Nations Unies en Grèce puis comme attaché militaire à Hong-Kong pendant 5 ans. Il étudie alors la pensée et les armées communistes. De 1956 à 1958, il rejoint l’Algérie et prend le commandement d’une compagnie. Il s’illustre dans son secteur en parvenant à le pacifier. Il est cité deux fois. Très marqué par son expérience à l’Armed forces staff college de Norfolk, il demande à être détaché comme visiting fellow à Harvard. Devant le refus de sa hiérarchie, il demande une mise en disponibilité de 3 ans et ne rejoindra plus l’armée.

2. SYNTHÈSE DE L’OUVRAGE 

L’ouvrage de Galula est une étude sur la guerre révolutionnaire qui présente les constantes de ce type de conflit qu’il a pu observer lui-même et propose quelques lignes de conduite pour mater une rébellion. Il structure son propos en sept chapitres.

On peut dégager quelques grandes idées de ces chapitres.

 

Définition de guerre révolutionnaire :

Elle est la condition d’existence de la contre-insurrection. Une guerre révolutionnaire est un conflit intérieur dans lequel l’insurgé tente de renverser le pouvoir en place. C’est pourquoi ces guerres prennent souvent la forme d’une guerre civile opposant l’insurgé au loyaliste et de nature asymétrique. C’est cette asymétrie qui fait la différence entre la guerre conventionnelle et la guerre révolutionnaire. L’action militaire ne constitue pas l’essence de l’insurrection. Elle doit pallier ses carences en moyens en particulier. Ainsi trouve-t-elle dans la population un objectif majeur qui doit devenir un soutien moral.

Conditions de victoire de l’insurrection :

  • une cause bien établie (ex d’échec d’une insurrection dû à une absence de cause : l’insurrection communiste grecque en 1950). On assiste au développement d’une forte propagande fondée sur des slogans simples (« la terre aux travailleurs » des communistes chinois). Cette cause peut changer de nature au gré des besoins politiques de l’insurgé et décline à mesure que l’insurrection se renforce.

  • Faiblesse du régime loyaliste : absence de consensus national, une gouvernance trop molle, méconnaissance par les autorités des phénomènes d’insurrection ou l’impossibilité de contrôler la population (pas d’appareil politique, une bureaucratie déficiente, une police ou des forces armées insuffisantes). Galula (P44) relate bien dans la « parabole de la voisine et du chat » un bon exemple de régime politique à la forte structure politique qui maintient la population dans un système de terreur.

  • Les conditions géographiques

  • Les soutiens extérieurs : ils sont multiples (politiques, techniques, financiers). Les soutiens moraux dont bénéficie l’insurgé quand sa cause va dans le sens de l’histoire peuvent retourner l’opinion. Ces soutiens constituent une aide décisive à moyen ou long terme (ex : aide militaire n’est utile que lorsque la force insurgée a atteint un certain niveau)

 

Deux types de guérillas :

Galula définit ces deux types en décrivant chacune des étapes de leur processus.

  • modèle « orthodoxe » (communiste) : création d’un parti, unification (alliance d’opportunité avec d’autres mouvements puis noyautage, élimination de leurs leaders si besoin, épuration du parti), combat de guérilla (pour prouver à la population la capacité à obtenir une victoire), guerre de mouvement (sans jamais chercher à défendre fermement une partie du territoire : il peut être question d’abandonner une région quitte à y revenir lorsque les troupes contre insurrectionnelles seront parties), dernières offensives.

  • modèle « bourgeois-nationaliste », qui passe par un terrorisme aveugle (faire parler de soi), puis par un terrorisme plus ciblé et enfin par les étapes du schéma orthodoxe à partir du combat de guérilla.

La contre-insurrection :

Avant de développer les huit points correspondant aux étapes conduisant à la Victoire de la contre-insurrection, Galula décrit les deux étapes par lesquelles passe l’insurrection :

  • La guerre révolutionnaire « froide » pendant laquelle l’insurrection reste dans la légalité en menant des actions non violentes.

  • La guerre révolutionnaire « chaude » pendant laquelle l’action de l’insurgé devient illégale et violente.

La seconde phase correspond à l’entrée en action des forces loyalistes. Galula nous indique par ailleurs, un classement cartographique du pays selon trois types de régions : ROUGES, ROSES, BLANCHES (ce code couleur correspond a degré de contrôle des régions par les insurgés ; ROUGES = l’insurgé contrôle la population et mène des combats de guérilla).

Le chapitre 7 est consacré à la victoire de la contre-insurrection en 8 étapes :

  • Détruire et expulser les forces d’insurrection en s’attaquant aux têtes de l’insurrection si possible en même temps ce qui conditionne en partie la suite des opérations. Ces opérations militaires sont appuyées par le renseignement et les opérations psychologiques de propagandes.

  • Déploiement d’unités locales statiques qui au contact de la population assurent sa protection et se substituent si nécessaire aux institutions locales.

  • Prise de contrôle de la population : cette étape délicate répond à un triple objectif ré-établir l’autorité loyaliste sur la population, l’isoler de la guérilla, recueillir du renseignement en vue de l’élimination des cellules de l’insurrection.

  • Destruction de l’organisation politique insurgée.

  • Organiser des élections locales.

  • Mettre à l’épreuve les dirigeants élus.

  • Organiser un parti politique.

  • Rallier et éliminer les derniers insurgés.

3. ANALYSE – AVIS :

Les armées occidentales sont engagées dans des conflits de types nouveaux si l’on prend comme référence la situation qui prévalait avant la chute du bloc de l’Est. Elles sont confrontées à un ennemi souvent insaisissable. C’est en particulier le cas des États-Unis d’Amérique (et de leurs alliés) dans leur engagement en Irak, mais aussi en Afghanistan. Ces armées dotées d’un armement technologiquement très performant peuvent-elles puiser dans cet ouvrage des enseignements utiles afin de sortir de l’impasse dans lequel elles semblent se trouver ?

Certes, l’ouvrage de Galula ne fait référence qu’à des guerres civiles idéologiques ou à des guerres de décolonisation de la chute de Tchag Kaï Chek à la guerre d’Algérie. L’insurrection en Irak ainsi qu’en Afghanistan est fondée sur des mouvements de nature religieuse. Cependant, les leçons de Galula semblent pertinentes, car il établit des principes généraux qui démontrent aujourd’hui encore toute leur actualité. En l’occurrence, le thème du soutien de la population qu’il aborde en détail dans son ouvrage apparaît toujours comme la clef de la victoire des forces qu’il qualifie de loyalistes.

C’est pourquoi l’action des États-Unis, en particulier en Irak, peut sembler discutable. Si son action a été d’une exemplaire efficacité comme l’expose le RETEX sur Falloujah, sa gestion de la phase de stabilisation s’est montrée plus médiocre. En voulant aller trop vite (l’organisation des élections), la coalition n’a pas suffisamment développé le maillage du territoire et le contact avec les populations même si les Britanniques ont tenté par leur action plus ouverte sur les Irakiens de compenser cet écueil. Les États-Unis ont pourtant fait preuve d’une volonté permanente d’adaptation. C’est pourquoi ils font un usage systématique du RETEX, mais aussi du débriefing jusqu’aux plus petits échelons.

L’influence de l’ouvrage de Galula sur la pensée stratégique américaine est indéniable. Il est devenu une référence importante pour tous les officiers du Staff College. Le pays qui a accueilli Galula, alors qu’il était mis au ban de la société militaire française dans les années 60, le remet en lumière en lui rendant une notoriété légitime dans la pensée militaire.

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